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 Don't take life seriously cause you won't get out alive *

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MessageSujet: Don't take life seriously cause you won't get out alive *   Don't take life seriously cause you won't get out alive * EmptyDim 5 Jan - 13:13

Don't take life seriously...


Il neigeait à en affoler les flocons, sur le village de Pré-au-Lard. Ils étaient tellement nombreux à dégringoler ainsi du ciel que, ainsi perdus dans la masse, il devait bien en avoir un ou deux en pleine crise identitaire.
Regardez-le, celui-là ! C'était peut-être un flocon parmi tant d'autres... Il tombe, il virevolte, comme eux tous. Mais il est unique. Unique. Il a son identité propre. Approchez-vous, attardez-vous sur lui. Oui, voilà... Ces branches d'eau frigorifiée qui dessinaient une si belle étoile, scintillante, magique. (Certes, il vous faut un sacré charme d'agrandissement pour voir ça mais faites fonctionner votre imagination !) Une petite merveille de perfection qui allait se fondre dans la masse, disparaître dans cette immensité immaculée qui le dépasse. Et s'évaporer au premier rayon de soleil. Peut-être avait-il des idées d’évasion, votre petit flocon, des envies de rébellion à vouloir braver la pesanteur. A lutter contre la gravité. Peut-être, pour la première fois, un flocon de rien du tout, minuscule, insignifiant, allait renverser la fatalité, faire le chemin inverse et remonter direct vers les étoiles.

Les yeux dans le vague, Abraham avait guetté, guetté à s'en user les yeux. Mais le clin d'œil du flocon révolutionnaire lui était resté invisible. D'une oreille distraite, il avait écouté Mae, sa plus jeune sœur, solliloquer sur son Jules, qui, en vérité, s'appelait Jeremiah. Ou Jiminy. Bref, un imbécile qui lui ratissait le cœur, l'écorchait sans pitié à tous les trois jours. Tout ça avait fini par sa main à elle sur sa joue à lui. Par ses mots à lui, brutaux, dans ses oreilles à elle. Et par ses yeux à elle qui n'en finissaient plus de pleuvoir. Le tout sur l'épaule du grand frère qui ne savait quels mots pouvaient bien apaiser un torrent pareil. Alors, au lieu d'activer ses cordes vocales, il avait laissé son oreille tourner à plein régime. Il était devenu une oreille grandeur nature, échelle humaine. Un grand siphon dans lequel se déversaient paroles hachées, hoquets malheureux et sanglots désordonnées.
Lui qui s'était débrouillé pour faire un saut au village histoire de faire une petite surprise à sa cadette ne s'était pas attendu à jouer les psychomages du jour. Il aurait peut-être dû, pourtant. Depuis maintenant un an et demi, Mae alternait les phases « les garçons me brisent le cœur, promis, j'arrête » avec les « comment je pourrais vivre sans eux ? ». C'était probablement une question d'habitude... et d'entraînement.
Il avait joué à l'oreille pendant dix minutes puis s'était doucement envolé par la grande fenêtre qui faisait l'angle, la laissant s'épancher tout son saoul. Il n'était plus qu'une oreille distraite qui serrait fort sa sœur contre sa poitrine, miséreux et impuissant à lui servir de paravents contre les aléas de la vie.
Une demi-heure plus tard, la chemise détrempé et le moral en chute libre (c'était qu'elle avait l'humeur contagieuse, sa petite sœur), il l'avait plantée là, au beau milieu d'une phrase, avec pour seul souvenir l'empreinte de ses lèvres sur le front. Il allait faire un tour. Ils se retrouveraient dans une heure ou deux. Pour dîner ensemble, comme promis. Il avait une course à faire.

Et, sans attendre de rebuffade ou de supplication, a longue silhouette, vaguement dégingandée, d'Abraham s'extirpa d'un pas nonchalant de l'atmosphère calfeutrée de l'auberge.


J'avais besoin de prendre l'air. Respirer un moment. Calmer mes neurones qui tournent à toute vitesse à m'en donner le vertige.
Le vent de ce début janvier me fouetta le visage et me remit les pieds sur terre. Ou sur neige, pour être exact. Je déambulai dans les rues de Pré-au-Lard sans vraiment prêter attention aux visages, aux vitrines, perdu dans le courant de mes pensées, comme bien souvent. Mon crâne n'abrite pas un long fleuve tranquille qui coule paisiblement. C'est plutôt un torrent qui se rue de l'avant, bouillonnant, éclaboussant, s'éparpillant au passage. Il y avait de tout, dans ces pensées-torrent : des souvenirs de mes propres samedis au village, écartelés par le visage inondé de Mae, lui-même dissout par l'air d'une chanson dont les paroles m'échappaient.

Puis, tout d'un coup, patatra, ce fut mon regard qui s'écrasa à mes pieds, tandis que le plink de l'éclair de génie me frappait : j'étais sorti pour trouver un quelque chose à ma sœur. Pas un cadeau, elle n'aimait pas tant ça. Non, plutôt une douceur pour lui mettre un peu de baume au cœur, un coup de fouet au moral. Un tout petit rien qui ramènerait de la couleur sur ses joues, un sourire sur ses lèvres et cette étincelle si particulière dans ses yeux. L'humeur mélancolique de Mae me contaminait toujours, malgré mes efforts pour résister à l'empathie.

Je me secouai mentalement (rien de tel pour remettre de l'ordre dans ses idées, pas vrai?), tout en furetant dans les ruelles. J'avais désormais un but, même si j'en ignorai la direction. Je n'étais plus un simple quidam errant au hasard, j'étais un pèlerin, un sourcier lancé dans une nouvelle quête. Armé de ma bonne volonté et de mon entêtement, je pouvais venir à bout de tous les dragons (commerçants, curieux, connaissances envahissantes). J'avais le front haut et la démarche fière.

Et boum. Re-belote. Patatra bis.
Mon regard qui zig-zagait au petit bonheur la chance, se fiant plus à l'instinct qu'à la raison, en oublia un instant ses recherches pour tomber sur une silhouette emmitouflée à quelques pas de moi. Mes neurones, si précieuses neurones, m'abandonnèrent. Mes yeux se fixèrent sur la silhouette. Boum. Exactement ça. Boum. Un coup de cœur visuel, le besoin, ou peut-être simplement l'envie d'avancer. Droit sur elle. Ou sur lui. L'hiver, en nous parant de nos épaisseurs multiples, gomme les différences, masque les identités. J'avais soudain envie de lier connaissance, avec cette ombre-là qui se dessinait à contre-jour. Pourquoi cette ombre-ci et pas cette autre-là ? Et pourquoi toujours des pourquoi ? Je fonctionne à l'instinct, toujours à l'instinct. Jamais à la raison, ou à la réflexion. Quelle horreur.
Alors, si cet inconnu(e)-là s'était fixé(e) sur mon radar, c'était que je devais y aller, provoquer la rencontre.
Oh, bien sûr, il y avait le coup de la boisson renversée. Ou de l'épaule que l'on bouscule, pardon, pardon, je ne l'ai pas fait exprès. Mais c'était tellement banal. Tellement « déjà-vu ».

J'avais une bien meilleure idée, qui s'était dessinée directement sur mes paupières. Je suis un visuel, il ne faudrait pas l'oublier.

Je m'approchai, nonchalant. Badaud parmi les badauds. Décidé mais pas arrogant. Droit sur ma silhouette. Je glissai vers elle, insoupçonnable. Un exemple de discrétion. Filature et tapinois. J'aurais réussi haut-la-main cette épreuve chez les Aurors. Au dernier moment, quand elle (ou il) pourrait presque sentir mon souffle dans son cou, j'attrapai ses épaules de mes deux mains, doucement, gentiment. Presque tendrement. D'une main que je libérai, j'écartai une mèche de cheveux qui s'était perdue sur cette nuque dénuée d'écharpe. Et sur cette nuque dénuée d'écharpe, je posai un baiser.



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MessageSujet: Re: Don't take life seriously cause you won't get out alive *   Don't take life seriously cause you won't get out alive * EmptyDim 5 Jan - 13:13






J'attendis avec une sorte de patience impatiente la réaction ulcérée de mon inconnu(e) qui ne devait probablement pas tarder. C'était l'un de ses instants où le temps suspend son vol pour passer chaque mouvement au ralenti.
A quoi allais-je avoir droit ? Une petite furie se jetant toute griffe dehors sur moi ? Une gifle bien sentie ? Une avalanche d'injures ? Ou, en toute simplicité, un sourcil étonné ? Un "pourquoi", un "comment" ? Un "je ne vous permets pas, monsieur !" ? Un "qui êtes-vous ? Au voleur ! A l'assassin ! On s'immisce dans mon intimité !" ?

* Ou rien de tout cela ... *

Ou rien de tout cela. Indeed.
Le fil des secondes, qui semblait s'être ralenti jusqu'à s'arrêter, reprit soudain son cours. A toute vitesse, comme pour rattraper le temps perdu. Je me pris l'image de mon inconnu en pleine figure. Son visage s'imprima sur ma rétine, qui convoqua dare-dare toute une flopée de souvenirs. Boum, la mémoire prit la relève et fit défiler en accéléré tout ce qu'elle pouvait associer à ce visage fin, ces grands yeux bruns. Boum boum boum. Lui, l'air rêveur, plongé dans un bon bouquin, au coin de la cheminée. Lui, ébouriffé, au saut du lit, guettant ce que la journée lui promettait. Lui, encore, le sourire aux lèvres, devant le bazar qui régnait chez moi, la première fois que je lui avais fait découvrir mon antre. Lui, toujours, les yeux clos, confiant, détendu, sa bouche à trois millimètres de la mienne. Lui, agacé, blessé, fuyant mon regard. Lui, lui, et lui. Sous toutes les coutures. Par tous les temps. Tous les modes. Lui, maintenant, juste devant moi. Si proche et pourtant si loin. Lui, bouche bée, air perdu, méfiant. Inattendu. Lui, au passé et au présent, confondu.

J'avais probablement l'air tout dépassé. Un peu niais peut-être. Les lèvres suspendues à mi-course, entre le sourire, charmeur, que j'avais préparé pour parer à toute éventualité, et...et la surprise, la stupeur.
Je le lâchai doucement, sans réussir à m'empêcher de le dévisager. Mais je ne le voyais plus vraiment. J'avais la tête pleine de ces images de nous, que je croyais enfermées bien au secret, loin, loin, tout au fond, à double-tour dans un recoin que rien ne viendrait déranger.
Une part de moi, un peu cynique, prenait le recul nécessaire pour ricaner des aléas du hasard. Lui et moi, comme ça, au détour d'une ruelle, plus de deux ans plus tard. Sûr, le destin aimait à se jouer de nous. Honnêtement, quelles étaient les probabilités pour que, au milieu d'une foule de gens, je tombe précisément sur lui. Foutue fatalité. Foutu instinct.
Promis, demain, j'arrêterai l'intuition et je me rangerai à la bonne vieille raison.

Ou pas.
La vie était tellement ennuyeuse quand on ne faisait que réfléchir.

Après quelques secondes qui m'apparurent comme une éternité, je lâchai enfin :

« Remus... »

Ou l'art des petits points dans lesquels j'essayait de caser un peu tout ce que j'éprouvais alors.

« Salut... »

Il y avait des moments comme ça. Où on se trouvait à court de mots.





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MessageSujet: Re: Don't take life seriously cause you won't get out alive *   Don't take life seriously cause you won't get out alive * EmptyDim 5 Jan - 13:13






Une moue m'étira les lèvres.
On en était donc réduits à ça ? A s'échanger des banalités comme deux gentils petits inconnus, deux étrangers enfermés dans le carcan des bonnes manières, lui-même verrouillé à double-tour par cette sacro-sainte politesse qu'on voulait nous voir accrocher en bandoulière.
C'était à m'en filer la nausée.
J'avais la banalité en horreur et les platitudes me donnaient de l'urticaire. J'imagine qu'on ne se refait pas.

Que dire ?
Que faire ?

* Fuir ? *

Fuir et laisser Remus reposer dans ma boîte à souvenirs. Le laisser appartenir à mon passé et continuer ma route, sans regarder derrière moi. Garder les bons moments, auxquels me raccrocher dans les moments de blues.
Sa bouche sembla frémit un instant, me donnant envie de...

* L'embrasser ? *

Et relancer une histoire qui s'était dissoute d'elle-même il y avait deux ans. Mes absences et la distance avaient peu à peu creusé l'écart entre nous. Nous nous étions moins vus et la vie nous avait emportés sur des rives différentes.
Je scannais son visage, à la recherche de je-ne-savais-quoi. De ce petit quelque chose auquel me raccrocher, sur lequel rebondir, qui m'indiquerait la marche à suivre. Tourner les talons ou engager une vraie conversation ?
Sur ses traits, je lus que le Remus d'autrefois avait vécu, avait grandi, avait mûri. Qui était-il ? Qui étais-je devenu ? En étions réduits à être des anonymes l'un pour l'autre ? Mon moi profond se rebellait contre cette évidence.
Une lueur dans son regard fit pencher la balance. L'eau avait peut-être coulé sous les ponts, nous en serions peut-être contraints à nous regarder en chiens de faïence, mais, au regard de ce que nous avions été, de la tendresse que j'avais eu pour lui, je ne pouvais pas le laisser me filer entre les doigts. J'avais besoin de savoir qu'il allait bien. Qu'il avait trouvé un équilibre.

Sans doute n'était-ce que la culpabilité qui guida ma décision. Je n'avais pas été très correct, dans les derniers temps de notre histoire. Un peu lâche, aussi. Je l'avais laissé s'éloigner. Ou bien était-ce moi qui m'étais détourné le premier ? Notre dernier échange, presque une dispute, revint brusquement au devant de ma conscience. Ses reproches, mon attitude fuyante. Je n'avais jamais aimé les situations de conflits. J'avais tout fait pour dédramatiser, prétendant que c'était mieux ainsi, que je le rendais à sa vie. Il avait bien assez de problème comme ça.

Maintenant, je savais ce dont j'avais envie.
Passer un moment avec lui.
Je m'abstins royalement de lui répondre, me contentant d'un faible sourire qui, au fond, ne voulait rien dire du tout.

J'attrapais Remus par le bras. Mes gants et l'épaisseur de sa veste rendaient le contact très impersonnel. Sans mot dire, je l’entraînais à ma suite dans le dédale des ruelles de Pré-au-Lard. Je ne regardais personne, les yeux tournés vers l'intérieur, tout à mon programme. Nous fîmes une halte aux Trois Balais, le temps pour moi de commander deux chocolats chauds, à emporter s'il-vous-plaît. J'avais lâché Remus le temps de la transaction mais lui reprit le bras dès que nous fûmes à l'abri des regards.
Cette fois, j'empruntai la rue principale et marchai droit devant moi. Cinq, dix, quinze minutes, jusqu'à ce que le village soit derrière nous. Je m'écartai du chemin et nous dénichai un petit coin, au pied d'un arbre centenaire. Je jetai un "incendio", histoire que l'on ne crève pas de froid et déblayai l'espace alentour de toute sa neige, grâce à un autre sortilège du même acabit. J'étais tellement concentré sur ma tâche que je ne me rendis même pas compte du petit miracle dont j'étais l'auteur. Je n'avais rien foiré. Du tout. Ces sorts étaient peut-être à la portée de n'importe quel première année mais j'avais toutes les peines du monde, en temps normal, à jeter le plus frêle maléfice. J'avais probablement la magie sentimentale, mes sorts n'étaient motivés que par mes émotions. Une grande colère et boum, je faisais tout exploser.

« blabla »






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MessageSujet: Re: Don't take life seriously cause you won't get out alive *   Don't take life seriously cause you won't get out alive * EmptyDim 5 Jan - 13:13






Bon.
Je ne serais pas vraiment honnête si j'affirmai que l'éclat de rire de Remus, à ce moment précis, ne m'avait rien fait du tout. Non, non. Rien. Pas la moindre petite palpitation cardiaque. Même pas un petit frémissement.
Menteur.
Je n'étais pas un insensible. Et la preuve était faite que le temps lui-même n'avait pas réussi à me rendre imperméable au charme de Remus.
Ça m'avait toujours fait quelque chose de le voir sourire, et plus encore de le voir rire. C'était tellement rare de capter chez lui un moment d'insouciance... Son visage se détendait d'un coup, il semblait plus jeune, comme un autre lui-même qui n'aurait jamais connu le poids de sa malédiction. Ses yeux étincelaient, brûlaient comme mille feux d'artifice. C'était ainsi qu'il m'avait tapé dans l'œil, la première fois. Je le revoyais, assis avec ses amis. C'était l'époque où j'avais souvent James Potter dans un coin de mon champ visuel. Ils discutaient tous avec animation, autour d'une boîte grande ouverte, qui avait probablement une histoire, ou recelait quelques trésors invisibles au commun des mortels. Et là, brusquement et sans préavis, j'avais entendu un rire chaud s'élever doucement dans la salle commune. Remus m'était soudain apparu, plus vrai que jamais, plus tangible. Le flou de son existence s'était fait plus net. Et j'avais remisé Potter aux oubliettes. Il m'avait ensuite fallu quelques mois pour l'approcher, l'apprivoiser, mais ça en avait valu la peine.

A capter ainsi son éclat de rire, au beau milieu de la neige de janvier, c'était ce souvenir qui était revenu frapper aux portes de ma mémoire. Et je sentis un instant mon invincibilité vaciller.
J'ouvris la bouche pour lancer combien il était bon de le voir ainsi désarmé et détendu. Et la refermai aussi sec. J'aimais la vérité, les vérités, mais elles n'étaient pas toutes bonnes à dire. Et je n'avais visiblement pas perdu l'habitude de me taire pour préserver Remus. Il avait déjà bien assez de souffrances dans sa vie. Pas facile d'être différent. Les autres n'étaient pas vraiment aptes à la compassion, si prompte à juger autrui. Les sobriquets ne manquaient pas dès que l'on sortait de la norme. Sang-de-bourbe, cracmol... de nos jours, le sang se devait d'être pur. Alors que dire d'un loup-garou ?

Je me contentais donc de me taire, une fois de plus. L'occasion pour moi d'avaler une gorgée de mon gobelet. Et d'échanger un demi-sourire avec lui devant le temps qu'on voulait bien se donner. Avant de surenchérir, pour tenter, moi aussi, d'alléger l'atmosphère :

« Mouais. La jeune Rosmerta a beau être la reine de la bierraubeurre, son chocolat, comme toujours, a bien trop de lait et pas assez de cacao... »

C'était une autre réminiscence, qui m'avait frappé.
Si mes souvenirs étaient exacts, Remus préférait de loin mes chocolats chauds à moi aux trucs fadasses que l'on trouvait en auberge. A cinq énormes cuillerées de cacao pour une petite tasse, il était aussi le seul à me faire l'honneur de réussir à avaler ma mixture.

Je notais négligemment, dans un coin de mon esprit, sa préférence pour le rouge et le blanc. On ne savait jamais.
Quant à moi...

« J'adore le rouge et le jaune. »

Je décrochai un sourire qui se voulait frondeur :

« J'imagine que tu sais maintenant pourquoi le choixpeau m'a envoyé chez les Lions... »

C'était ma petite amertume à moi.
On m'avait pas mal charrié sur ma maison, arguant que je n'avais pas le courage qu'il fallait pour être à Gryffondor. J'étais trop fuyant, trop insaisissable. S'il y avait eu une maison du Centaure, c'était probablement là que j'aurais dû échouer. A regarder les étoiles et à refuser de me mêler aux considérations bassement humaines.
(Certains de mes camarades auraient plutôt voté pour la maison du Lapin pour sa promptitude à déguerpir à la moindre alerte... mais ceux-là ne me connaissaient que très mal. C'était ce que j'avais tenté de me répéter au cours de mes premières années, avant de décider que je n'avais que faire de l'opinion des autres. )
Mais tout ça était derrière moi.

Il me restait une réponse à donner. Et, malgré mon grand amour de la vérité pure et dure, je me tâtais. L'envie stupide et immature de paraître plus beau, plus grand, plus fort. Je pouvais m'inventer une vie de chasseur de trésors, d'explorateur intrépide ou de sorcier fou. Aucun de mes collègues français n'était dans les parages pour vendre la mèche.
Mais parce que Remus était Remus, je n'osais. J'avais l'impression que quelque chose dans son regard saurait toujours si je lui baratinais des inepties. Je ne suis pas un bonimenteur très doué.

« Humph... », commençai-je, en véritable écossais. « Humph » était en quelque sorte notre marque de fabrique. Selon le regard, la situation, l'attitude et l'intonation, « humph » pouvait vouloir dire tout et son contraire. Et il n'y avait probablement qu'un enfant des Hautes Terres pour en saisir toute la subtilité. Embarrassé, je me passai une main dans les cheveux, ébouriffant ma crinière. Je ressemblai probablement à un hérisson highlander roux. Et hésitant. « Je suis, en quelque sorte, éducateur de citrouilles. »

C'était plus ou moins ça.
Je préférais de loin l'humour léger d'être éducateur que le terme ronflant de « poticulteur ». Erk.
Bien que j'aurais aimé orienter la conversation sur des sujets moins terre-à-terre, je ne pouvais pas faire moins que rendre la pareille à mon compagnon :

« Et toi ? Je suis sûr que tu as réussi à arracher quinze fois plus d'ASPICs que moi. »

Ce qui n'était pas très difficile en soi. Avec deux APSICs à mon compte, j'étais probablement entré dans le Poudlard Guiness Record. La petite grimace d'auto-dérision que je lui servis en était la preuve.
Sans rien ajouter de plus, je continuai de boire tranquillement mon chocolat chaud, tandis que mon feu nous réchauffait mieux que cette invention étrange que les Moldus appelaient le radis-a-tort (le braviateur ? Le radiateur ?). Au rythme où on les engloutissait, nos gobelets allaient probablement être vides et ultra-vides d'une minute à l'autre. Fort de mon succès précédent (peut-être ma nouvelle baguette n'était-elle pas si pourrie finalement?), je me préparai à jeter un sortilège de remplissage, histoire de renouveler nos stocks...

Et pvbooooooooooooooouf !
Le peu de boisson cacaotée qui restait gicla à tort et à travers, tamisant la neige qui avait désormais autant de tâches de rousseur que moi. Nos gobelets étaient partis en fumée.
Au fond de moi, j'entendais presque ma baguette ricaner « Gniak gniak ! Pourri toi-même ! ».








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MessageSujet: Re: Don't take life seriously cause you won't get out alive *   Don't take life seriously cause you won't get out alive * EmptyLun 6 Jan - 23:12






Pour être franc, mes joues à moi, sans avoir viré écarlates, s'étaient un tantinet échauffées. Eh quoi ! Ça n'était pas tous les jours qu'un loup-garou plein de charme me sautait sur les genoux...surtout après avoir rajouté un épisode à la liste de "Les Pires Hontes de Ma vie". Sérieux ! Qu'est-ce qui m'avait pris de me lancer dans un sortilège aussi complexe ? (Complexe pour moi, s'entend. N'importe quel cinquième année le réussirait les yeux fermés. )

* Une petite envie d’impressionner Remus, peut-être ?

Par Merlin ! J'avais oublié que mes neurones tournaient d'eux-mêmes et s'infiltraient dans mes pensées dès que j'avais le dos tourné. Je me serais bien passé de leur avis...
Mais revenons à nos moutons. A nos loups, pour être plus précis.
Avec ses yeux enlignés droit dans les miens et la situation qui était en passe de devenir franchement tendue, je dus me faire violence pour résister à mon sens de l'humour un peu corrosif. Pas sûr que lui dire que je m'étais brûlé, mais pas au chocolat, soit une remarque judicieuse pour démêler la tension qui s'était glissée entre nous. Vraiment pas sûr. A la place, je visais dans le un peu moins caustique :

« Bah, j'ai survécu... »

Étais-je déjà un peu cynique, deux ans plus tôt ? Ou Remus venait-il de découvrir ce nouveau trait de caractère ?
Aucune idée.

« Bon... »

Je n'avais, une fois de plus, aucune idée de ce que j'allais bien pouvoir dire. A croire que la présence de Remus, à quelques pas de moi, m'atrophiai le cerveau. J'avais presque l'impression d'être revenu trois ans plus tôt, quand je cherchai à me rapprocher de lui, sans manquer de bafouiller à toutes les deux phrases. A l'époque, j'avais un talent certain pour être pathétique dès qu'il était dans les parages.

« Remus... »

Merde !
Qu'est-ce que j'allais bien pouvoir trouver à raconter, maintenant que je m'étais lancé ? Pourquoi je ne m'étais pas contenté d'un : « bon, c'était un plaisir mais j'ai un rendez-vous, je te laisse ! » ? Voilà qui aurait été bien plus sensé !

Je le regardais, il me regardait. Et plus je le regardais, plus je me demandais qui il était aujourd'hui. Si les hommes que nous étions devenus se seraient plus si nous ne nous étions pas connus plus jeunes. Aurait-il seulement arrêté son regard sur moi ? Où était-ce la nostalgie de ce que nous avions partagé qui tissait cette atmosphère étrange entre nous ?
Je savais que j'aurais dû me lever, partir, avant de réveiller trop de souvenirs. Mais la seule chose que je savais, c'était que j'avais envie de rester encore un peu avec lui. Ça n'était pas sage. Ça n'était pas respectueux de lui. C'était juste égoïste. Parce qu'en dépit de cette gêne, je me sentais bien, au beau milieu de toute cette neige. Je parle de la neige mais je ne pense pas qu'elle y était pour grand chose.

Alors, oui. J'aurais pu me lever. Mais je ne l'ai pas fait.
J'aurais pu l'embrasser, il n'était pas si loin (et ce n'était pas l'envie qui m'en manquait). Mais je ne l'ai pas fait.
J'aurais pu lancer « Il faut qu'on parle ». Mais je ne l'ai pas fait.

J'ai joué au lâche. C'était ce que je savais le mieux faire.

« Tu nous sèches ? »

C'était à peine si j'avais glissé une lueur mutine au fond de mon regard. Un peu de provocation.

« Tu l'as dit toi-même... Je suis toujours aussi doué en sortilèges... »

Aucune amertume dans ma voix. Un peu d'amusement, peut-être.
Pour une fois, ma trollitude en magie me servait bien. J'avais envie de voir s'il oserait s'approcher une nouvelle fois. J'espérais bien que oui. J’espérais bien que non. Je jouais à un jeu qui risquait probablement de m'exploser à la figure.






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